9. Nous estimons que l’esprit de l’enfant n’est pas un simple sac à idées, mais plutôt, si on permet cette illustration, un organisme spirituel doté d’un appétit pour toute connaissance. La nourriture adaptée est celle qu’il est capable de traiter, de digérer et d’assimiler, tout comme le corps digère les aliments.
10. Une doctrine comme celle d’Herbart, qui affirme que l’esprit est un contenant, met le fardeau de l’éducation (la préparation des connaissances en morceaux alléchants, présentés de façon bien ordonnée) sur l’enseignant. Les enfants qui reçoivent ce type d’éducation sont en danger de recevoir beaucoup d’enseignement, mais peu de connaissances. La devise de l’enseignant devient « ce que l’enfant apprend importe moins que la façon dont il l’apprend. »
Il y a une grande différence entre exercer l'esprit et nourrir l'esprit.
Nous avions vu que l'éducation est une vie et que nous devons donc proposer aux enfants des pensées et des idées vivantes, et pas des faits secs.
Charlotte Mason écrit aussi :
« Nous savons que la nourriture est au corps ce que le carburant est à la machine à vapeur, la seule source d'énergie ; une fois que nous réalisons que l'esprit aussi ne fonctionne que lorsqu'il est nourri d'éducation nous apparaîtra sous un jour nouveau » ( A Philosophy of Education , pp. 104, 105).
Dans cette optique, on considère donc que l'esprit de notre enfant n'est pas un récipient que nous remplissons mais un organisme qui a un appétit. Tout comme votre corps absorbe de la nourriture, la digère et l'assimile pour se nourrir, de même l'esprit absorbe des idées, les digère et les assimile pour se nourrir.
Le site Simply Charlotte Mason propose cette analogie :
Maintenant, réfléchissez un instant à ce que ce serait si vous décidiez de mettre votre corps en forme et que vous commenciez un programme d'exercices, un programme qui brûle vraiment les calories. Vous faites de l'exercice tous les jours... Mais vous n'avez jamais rien mangé. Vous n'avez pas nourri votre corps. Tout exercice, pas de nourriture. Résultat ? Votre corps s'affaiblirait et mourrait de faim.
Et c'est la même chose pour l'esprit. Votre esprit et celui de votre enfant ont besoin d'être nourris, pas seulement exercés. C'est un point clé pour décrire les différences d'approches pédagogiques. De nombreuses approches pédagogiques se concentrent sur l'utilisation de l'esprit, l'exercice de celui-ci ; mais l'approche de Charlotte Mason met l'accent sur nourrir l'esprit, le nourrir.
« Utiliser l'esprit n'est en aucun cas la même chose que de le nourrir » ( A Philosophy of Education , p. 288). Lorsque votre élève traite des faits bruts, qu'il s'agisse de les étudier, de les mémoriser, de les pratiquer ou de les rappeler, il utilise son esprit, l'exerce. Quand il a affaire à des idées – des idées vivantes qui touchent les émotions et enflamment l'imagination – il nourrit son esprit.
L'esprit a besoin de nourriture, pas seulement d'exercice.
Simply Charlotte Mason propose ces deux listes :
Ces activités exercent l'esprit :
mémoriser des faits;
rappel de faits en réponse à des questions directes;
pratiquer une formule mathématique;
approfondir des faits mathématiques dans un test chronométré ;
faire des puzzles de recherche de mots ;
compétition dans les abeilles d'orthographe;
changer la ponctuation sur des phrases délibérément incorrectes ;
acquérir des habiletés physiques pour exercer un métier;
colorier, couper et coller selon un kit ou un échantillon prédéfini ;
jouer à des jeux vidéo de résolution de problèmes;
copier les définitions d'une liste de mots.
Activités qui nourrissent l'esprit :
lire des livres pleins d'idées vivantes, pas seulement des faits secs ;
écouter de bonnes, nobles et belles pensées en poésie;
passer du temps dans la création de Dieu, regarder et écouter attentivement ;
écouter de la bonne musique avec une attention particulière ;
regarder de près les grandes œuvres d'art;
appliquer des vérités mathématiques à des situations quotidiennes pertinentes ;
découvrir l'orthographe et la ponctuation à travers la grande littérature ;
mémoriser et réciter les Écritures, les paroles des hymnes et la grande poésie ;
chanter de grandes chansons et des hymnes ;
passer du temps avec des modèles qui démontrent de bonnes habitudes et un bon caractère ;
présenter et discuter des principes intemporels
1. N'oubliez pas que l'exercice n'est pas nécessairement mauvais en soi.
Il y a un temps pour pratiquer les mathématiques. Il y a un temps pour rechercher des définitions de mots ou pour mémoriser comment un mot est orthographié.
Simplement il ne faut pas faire que cela.
Dans une éducation Charlotte Mason, la nourriture vient en premier, les idées viennent en premier; puis de ces idées découlent naturellement un certain exercice. Nous lisons d'abord une idée d'un livre vivant, puis nous guidons l'étudiant à rechercher dans ce passage les mots qu'il ne sait pas épeler et à les étudier. Mais nous ne donnons pas seulement des listes d'orthographe à mémoriser. On donne d'abord les idées.
Donc concentrez-vous sur les idées et laissez l'exercice en sortir naturellement. C'est la façon Charlotte Mason.
2. Donnez à votre enfant (et à vous-même) une abondance de nourriture mentale. N'ayez pas peur de suralimenter l'esprit.
Charlotte a dit : « Notre faute, notre très grande faute, est que nous gardons nos propres esprits et ceux de nos enfants honteusement sous-alimentés » ( A Philosophy of Education , p. 330). Assurez-vous de fournir un généreux festin d'idées dont votre enfant pourra se nourrir. Soyez prudent lorsque vous choisissez le programme d'études afin qu'il offre une abondance de nourriture pour l'esprit de votre élève.
Revenez donc en arrière et passez en revue cette deuxième liste, la liste des activités qui nourrissent et nourrissent l'esprit, puis comparez-la au programme que vous utilisez. Inclut-il fidèlement ces activités nourrissantes ? Fournit-il suffisamment d'idées pour nourrir l'esprit de votre enfant ?
Pour aller plus loin sur le 10e principe
(attention c'est plus pointu, n'hésitez pas à le laisser de côté pour un temps et à y revenir plus tard)
Qu'ajoute le 10e principe ?
(je m'appuie ici sur le site https://charlottemason.fr/les-20-principes/)
Il faut d'abord resituer la philosophie de Herbart en vogue à l'époque de C.Mason. Elle considère (et nous je n'ai pas assez creusé le sujet pour me prononcer la-dessus) que cette pensée a donné lieu dans "l’enseignement à la construction de « séquences pédagogiques », de « unit Study », de corrélations d’éléments censées se combiner eux-mêmes dans l’esprit et y faire leur entrée.
Pour exposer ses idées, elle prend à titre d’exemple un « plan de travail avec Robinson Crusoé » donné à des enfants de CP dans une école élémentaire : « Nous avons d’abord neuf leçons de littérature et de langue, les matières étant telles que « Robinson grimpe une colline et découvre qu’il est sur une île ». Ensuite, dix leçons d’objets dont la première est, –– La mer, la seconde, Un navire de coins étrangers, la sixième, Un bateau de sauvetage, la septième, Coquillages, la dixième, Une grotte. On ne voit pas comment ces « objets » doivent être produits. La troisième série propose des leçons de dessin, probablement autant, un bateau, un navire, une rame, une ancre et ainsi de suite. Vient ensuite une série d’activités manuelles, toujours construite sur « Robinson » ; la première, une maquette du bord de mer ; puis des maquettes de l’île de Robinson, de la maison de Robinson et de la poterie de Robinson. Le cours suivant consiste en de la lecture, un nombre infini de leçons, – « des passages de The Child’s Robinson Crusoe et d’un lecteur généraliste sur les sujets abordés dans les leçons d’objets ». Vient ensuite une série de leçons d’écriture, « des compositions simples sur le sujet des leçons. …».
Elle poursuit : « Le tout doit être très amusant pour l’enseignant, comme le sont toujours les amplifications ingénieuses auto-produites : que les enfants étaient aussi divertis, on n’en doute pas. La maîtresse ...jouait, en fait, un rôle et les enfants étaient amusés comme à un spectacle, au cinéma ou autre ; mais nous pouvons être sûr d’une chose, un dégoût total, un dégoût, de la part des enfants pour toujours, non seulement pour « Robinson Crusoé » mais pour chacun des sujets trimballés pour illustrer ses aventures. »"
Pour Charlotte Mason cela revient d'une part à faire le tri, les connexions à la place de l'esprit de l'enfant, et donc à susciter la passivité et l'attrait pour la facilité... et d'autre part à faire du professeur le grand ordonnancier qui va devant vos yeux ébahis va mettre en relation toutes les composantes de la connaissance.
Les leçons peuvent peuvent être amusantes, les enfants divertis... mais cela ne suffit pas !
Car La question n’est pas : « Que sait un enfant quand il a terminé sa scolarité ? », mais « combien s’en soucie-t-il ? » et « de combien de choses se soucie-t-il ? »
Un élève habitué à la passivité n'aura pas la discipline mentale qui finit par produire de la concentration et la capacité de travailler seul. « Il est rarement laissé à lui-même le livre entre les mains, obligé de concentrer tout son esprit sur les mots ennuyeux sans personne à portée de main pour lui expliquer ou faciliter son travail de mémoire par des petits trucs de répétition et d’association… » (volume 6, p. 119)
Comments